3 septembre - 8 octobre 2022
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Paris
76 rue de Turenne
75003 Paris France

La galerie Perrotin est heureuse de présenter, Dead Leg, la première exposition personnelle d’Elizabeth Glaessner à la galerie. L’exposition rassemble une quinzaine de peintures réalisées ces deux dernières années, et un ensemble d’oeuvres sur papier récentes.

View of Elizabeth Glaessner's show 'Dead Leg' at Perrotin Paris, 2022. Photo: Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin
View of Elizabeth Glaessner's show 'Dead Leg' at Perrotin Paris, 2022. Photo: Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin
Vue de l'exposition "Dead Leg" d'Elizabeth Glaessner à la galerie Perrotin, 2022. Photo: Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin
Vue de l'exposition "Dead Leg" d'Elizabeth Glaessner à la galerie Perrotin, 2022. Photo: Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin
Vue de l'exposition "Dead Leg" d'Elizabeth Glaessner à la galerie Perrotin, 2022. Photo: Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin
Vue de l'exposition "Dead Leg" d'Elizabeth Glaessner à la galerie Perrotin, 2022. Photo: Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin
Vue de l'exposition "Dead Leg" d'Elizabeth Glaessner à la galerie Perrotin, 2022. Photo: Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin

Depuis qu’elle a obtenu son MFA in 2012, Elizabeth Glaessner a entrepris une recherche picturale qui, dans ces dernières années justement, semble avoir trouvé l’exact chemin qui convient à son épanouissement. Sa palette colorée s’est resserrée sur des bleus, des verts et des bruns ; ses sujets ont été recentrés autour de situations post-apocalyptiques mettant en scène essentiellement des femmes en prise au désarroi ; son style, lui aussi, s’est aiguisé et affirmé : les ambitions de sa peinture sont désormais précises et explicites.

Elizabeth Glaessner, Dead Man's Fingers, 2022, oil on canvas, 177.8 x 241.3 cm | 70 x 95 inch. Courtesy of the artist and Perrotin

« Donner la possibilité aux choses de ne pas toujours avoir un sens – ça m’aide à laisser des choix compositionnels façonnerun récit. Ne pas m’enchaîner à la réalité… Je suppose que ç’a été un moment crucial. » déclarait-elle au magazine Interview en juillet 2014.


C’est de toute évidence encore le cas aujourd’hui, où les relations qui unissent la composition du tableau avec son récit semblent avoir été apaisées par une mise à distance affirmée avec toute tentation de réalité. Une jambe disparait dans la jointure des deux toiles accolées qui composent Rabid Hole, 2022, et si la progression du tableau le suggère, une paire de jambes se terminera par des têtes d’oiseaux Dead Can Dance, 2020, imprimant une dimension surréaliste à une peinture finalement plus proche du symbolisme où pessimisme, ésotérisme et mélancolie semblent engagés dans une valse à trois temps. Un symbolisme dans lequel l’idée même de la femme fatale aurait cédé la place à l’addition de destins féminins tragiques sur lesquels plane la responsabilité masculine autant que celle d’une humanité qui l’a bien cherché. Mais un symbolisme qui conserverait les postures particulières de ses personnages féminins, souvent contraintes, et la gestion théâtralisée des chevelures.

La peinture de Glaessner semble commencer « juste après » Adam et Eve chassés du paradis de Masaccio dans la chapelle Brancacci de l’église du Carminé à Florence. Un après qui serait nourri de tout ce qui sépare cette petite fresque extraordinaire de notre aujourd’hui connecté. La violence de ce départ narratif, qui voit les deux personnages éconduits porter sur leurs corps mêmes leur irrémédiable accablement, est la même que celle à l’oeuvre dans la peinture de Glaessner. Pour autant, cette dernière ne renvoie à aucun événement particulier et articule plutôt les conditions de récits ouverts : rien ne dit par exemple si le petit personnage de Escapism, 2022, sort de, où bien s’il est contraint à entrer dans, le bas ventre au bas duquel une main le reçoit – ou le force.

Vue d'Elizabeth Glaessner dans son studio à New York. Courtesy of Perrotin

Les réalités auxquelles renvoient les scènes représentées sont tout aussi vaporeuses que leur traitement pictural, et probablement tout aussi complexes que le traitement de la matière picturale, qui parfois imbibe à peine la toile (en laissant alors voir le grain) et parfois l’empâte. Les scènes baignent dans des atmosphères intenses dans lesquelles il faut savoir s’immerger, le récit ayant finalement moins d’importance que les émotions qu’il convoie, et l’on a plus d’une fois le sentiment d’être face à Loïe Füller executant sa danse serpentine dans les eaux d’un lac d’altitude. Il ne s’agit pas de reconstituer, à la manière d’une enquête policière, la succession d’événements ayant conduit ces personnages à leur évidente désolation mais d’en prendre acte et, probablement, de partager cette désolation parce qu’elle est aussi la notre. Clairement ces personnages catastrophés ouvrent la voie à nos remords, notre sentiment d’injustice, de culpabilité, à notre lâcheté peut-être tout autant qu’à notre instinct de survie.

C’est plutôt Degas qui inspira cette exposition que Glaessner relie à un récent séjour à Paris et sa découverte, au musée d’Orsay, de Scène de guerre au Moyen Âge (ou Les Malheurs de la ville d’Orléans), 1865, d’Edgar Degas (1834 – 1917). « Quand j’ai vu ce tableau, j’ai été frappée de voir à quel point il semblait contemporain. À une époque où les droits des femmes sont en retrait et où nos corps sont de nouveau menacés, je repense à la nature cyclique de l’humanité et à notre incapacité manifeste à fuir cette bataille qui tourne autour du pouvoir et du contrôle » confie Glaessner et de manière littérale, le personnage féminin sur la droite du tableau, au sol, dénudé, piétiné par un cheval, se retrouve en effet dans son propre War in the Middle Ages, 2022. Enfin, c’est moins ce personnage qui s’y retrouve que sa posture – et c’est un fait que plusieurs siècles de peinture offrent à Glaessner un alphabet de postures dans lesquelles elle puise. Que ses personnages semblent parfois être les descendants directs de ceux des enluminures médiévales leur donne de toute évidence une épaisseur inattendue.

Au tableau de Degas vu au Musée d’Orsay (et à toutes les études de baigneuses dont Glaessner ne fait pas mystère de s’être inspirée), l’artiste ajoute Angélique sauvée par Ruggiero (1819 – 1839) par Jean Auguste Dominique Ingres, un tableau qu’elle vit au musée du Louvre, et dont le personnage féminin, dénudé, a les mains ligotées. Il conduisit son esprit vers les quatre-vingt-deux gravures de Les Désastres de la Guerre (1810-1815) de Goya (1746-1728), représentations des conséquences de la guerre aux titres morbides (Enterrer et se taire, On ne peut plus rien y faire, Personne n’est là pour les secourir ou Ne fais pas ça non plus, estampe n°10 de la série qui évoque les abus sexuels dont furent victimes les femmes espagnoles).

Il n’est pas si singulier que cela, en vérité que tel ou tel personnage de telle ou telle peinture historique ait nourri l’imaginaire et le vocabulaire plastique de Glaessner. Que l’histoire de la peinture nourrisse l’aujourd’hui de la peinture est bien la moindre des choses et c’est le contraire qui semble une supercherie : lorsqu’on va chercher ailleurs que dans l’histoire des formes. Ne subsiste de ces personnages moins télé-transportés qu’approximativement ressuscités leur inscription par l’artiste dans des décors/paysages sans jamais aucune construction humaine, une sorte de nature primaire ni bienveillante ni hostile, mais théâtre d’un purgatoire dont les raisons sans doute ne manquent pas.

View of Elizabeth Glaessner's show 'Dead Leg' at Perrotin Paris, 2022. Photo: Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin
Elizabeth GLAESSNER

Née en 1984 en USA
Habite et travaille à Brooklyn, USA

Puisant dans l’histoire de l’art, la mythologie, la mémoire et la culture pop, les peintures oniriques d’Elizabeth Glaessner évoquent un univers surréaliste dépourvu de frontières conventionnelles. Dans ce royaume imaginaire, des figures fluides, flottantes, insaisissables peuplent des paysages amorphes où la personne comme l’environnement sont dans un état apparemment constant de métamorphoses. Glaessner débute chaque œuvre de manière intuitive, en couchant de l’huile sur des pigments coulés, permettant à la peinture d’interrompre la narration pour laisser place au subconscient. Inspirée par des peintres symbolistes tels qu’Edvard Munch, Glaessner révèle un monde psychologique grâce à l’utilisation singulière de sa palette et sa technique inhérente à son art. Par l'aspect et le cheminement de sa pratique, ses peintures agissent comme des passerelles vers des émotions inexploitées, déclenchant notre inconscient primordial, libéré du fardeau des frontières sociétales et des codes moraux.




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