Réalisé en consultation avec la Warlukurlangu Artists Aboriginal Corporation et la communauté aborigène de Yuendumu dans le Territoire du Nord en Australie, le film OttO interroge l’impact physique, sensoriel et spirituel que peuvent avoir certains lieux sur ceux qui en font l’expérience. Posant la question de ce qu’est la « force » d’un lieu et postulant le fait qu’un jour peut-être, cette force pourra être scientifiquement mesurée, Laurent Grasso a filmé des sites sacrés aborigènes avec des caméras thermiques et hyperspectrales placées sur des drones. Ces sites coïncident avec des formations géologiques ancestrales : monolithes, gorges, lacs salés et collines sont des points marquants des terres aborigènes. Considérés comme des interfaces entre les Anciens et les vivants, entre le monde du dessous et le monde du dessus, entre le passé et le présent, ces sites ont été singularisés en raison de leur caractère exceptionnel. L’artiste a travaillé avec les traditional owners qui possèdent un droit immatériel sur chacun des sites sacrés et qui sont les dépositaires d’une narration (le Dreaming) qui leur est étroitement associée. OttO tente de capter, mesurer et révéler – comme s’il s’agissait de radiations – la force immatérielle émanant de ces lieux. L’utopie d’un monde mesurable et quantifiable se trouve ici confrontée à ce qui échappe à l’objectivation. L’imagerie scientifique produite avec les caméras thermiques permet de développer une fiction autour de l’invisible et de sa révélation. Les sphères translucides qui parcourent les paysages sacrés sont quant à elles des matérialisations abstraites de narrations secrètes, de présences et de forces potentielles découlant de ces lieux. Littéralement comme métaphoriquement « chargés », les sites sacrés sont intrinsèquement liés à l’invisible et à ce secret. Pour voir l’invisible, il faut être initié. Un regard étranger ne peut qu’être fictionnel : il s’agit par la fiction de reconnaître le caractère spécial de ces lieux et de suggérer par l’image que des phénomènes invisibles mais pourtant bien réels s’y produisent. Le titre du film, OttO, découle de cet entrelacement entre fiction, réalité, croyance et science: il désigne à la fois le traditional owner Otto Jungarrayi Sims dont on aperçoit la silhouette dans le film et le deuxième prénom du physicien allemand Winfried Otto Schuman1. Ce dernier a prédit dans les années 1950 l’existence de fréquences électromagnétiques circulant entre la surface de la terre et l'ionosphère.
Expositions : 2021
« Just looking, Still looking, Always looking », Aranya Art Center, China
« Beneath the Mountains, Along the Waters », Jeonnam Museum of Art, Jeollanam-do, South Korea
2020
« Panoptes », Musée Zadkine, Paris, France
« Pine’s Eye », The University of Edinburgh, Edimbourg, United Kingdom
2019
« Unlimited Art Basel », Basel, Switzerland
2018
« SUPERPOSITION. Equilibrium & Engagement. 21st Sydney Biennale. », Carriageworks, Sydney, Australia
« OttO », Perrotin, Paris, France